Quelques enseignements du litige entre Vista et Windows Vista

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Alors que Microsoft vient d’être assigné par la société Télévista et avant même que le litige ne se développe devant le tribunal, on peut déjà tirer quelques leçons de ce conflit qui oppose une marque Vista antérieure à la marque Windows Vista. Pour plus de précisions sur le contexte du litige, on peut consulter ce billet sur le pMdM.

A partir des informations révélées dans la presse par Philippe Gildas, porteur d’un projet de chaine de télévision Vista visant un public « sénior », quelques recherches permettent de poser les cartes sur la table et d’anticiper comment le conflit peut se développer stratégiquement (sans parler ici de l’appréciation du risque de confusion entre les signes).

Dans le cadre de l’action en contrefaçon, le litige ne se réduit pas à une confrontation entre chaine de télévision et système d’exploitation. En effet, le lien entre les activités visées par les marques en jeu est bien plus étroit. Les marques Vista et Windows Vista sont enregistrées pour des produits (en partie) identiques : la marque Vista a été enregistrée notamment en classe 9 pour les logiciels et la marque Windows Vista a été enregistrée pour une catégorie plus particulière de logiciels, à savoir les systèmes d’exploitation.

Mais le demandeur pourra t’il effectivement plaider son action en contrefaçon en posant le conflit sur le terrain des logiciels ? Rien n’est moins sûr.

Le temps qui passe peut handicaper l’action en contrefaçon : pour les produits et services qui n’ont pas fait l’objet d’une exploitation au cours des cinq dernières années la marque peut être annulée. Cette action en déchéance pour défaut d’usage peut intervenir reconventionnellement en cours d’instance à partir du moment où cinq années se sont déroulées depuis la date d’enregistrement. En l’espèce, la marque française Vista n°03 3 217 295 pourra faire l’objet d’une telle action dès le 29 août 2008, date à laquelle il est très peu probable qu’une décision définitive soit intervenue dans l’instance principale en contrefaçon. Télévista aura entre temps lancé la chaine Vista (ce qui est prévu pour novembre 2007), mais si l’usage réel et sérieux de la marque ne peut alors pas être prouvé pour les logiciels, celle-ci risque d’être annulée pour ces produits.

Comme j’ai eu l’occasion de l’indiquer, le tribunal serait alors amené à évaluer s’il existe un lien de similarité entre les services des classes 38 et 41 (qui ne seront probablement pas atteints par la déchéance de la marque) et les produits pour lesquels la marque Windows Vista est enregistrée et exploitée, ceci en tenant compte des possibilités « multimédia » du système d’exploitation. L’évolution du conflit vers ce genre de question, certes passionnante pour les juristes, augmente par rapport à la situation de départ (logiciels c./ système d’exploitation) l’aléa juridique pour le demandeur.

La leçon à titrer de cette évaluation prospective ?

Télévista aurait pu dès le départ et sans exposer sa marque au risque d’une action en déchéance, bloquer l’enregistrement de la marque de Microsoft via une opposition. Pour pouvoir engager une opposition dans le délai (très court) qui est ouvert pour ce genre de procédure administrative, on doit exercer une surveillance systématique des publications des nouvelles demandes d’enregistrement.

Ce type de surveillance constitue l’une des prestations ordinairement fournies par les Conseils en Propriété Industrielle.

Lien Permanent pour cet article : http://www.voxpi.info/2007/06/06/quelques-enseignements-du-litige-entre-vista-et-windows-vista/

2 Commentaires

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  1. Bonjour,

    Je suis tout à fait d’accord avec vous pour insister sur le fait que la marque Vista pourrait tomber en déchéance pour le domaine des logiciels d’ici la fin de la procédure. C’est un élément d’information peu ou pas soulevé depuis le début du débat.
    Je vous invite par ailleurs à aller voir mon nouveau blog sur http://protectiondesmarques.wordpress.com et à l’ajouter a votre blogroll si vous le souhaitez.
    Je me permet d’ajouter votre site à mes liens.
    Bonne journée
    Simon

    • un auteur sur 10 juin 2007 à 10 h 50 min
    • Répondre

    Il y a quelques questions de fond à se poser tenu compte de la nature écrite de l’oeuvre originale.

    Vista est le titre d’un logiciel système qui par sa nature est une oeuvre écrite et est protégé comme tous les titres d’oeuvres logicielles et comme tous les titres d’oeuvres protégées par la propriété littéraire (L.112-4 CPI) et ne ressort pas de la propriété industrielle.

    Le dépot de marque du titre d’une oeuvre écrite comme un logiciel et oeuvre protégée par la propriété littéraire est-il nécessaire en droit français ? Ou tout simplement légal (cas linux) ?

    Sans réflexion de fond sur le droit applicable aux logiciels et sur la nature de l’oeuvre, on risque d’assister une fois de plus à une confusion juridique basée sur la méconnaissance de la nature des oeuvres et confusion qui malheureursement fait florès.

  1. […] Complément : mon billet sur Vox PI. […]

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