Précisions utiles sur la titularité des droits d'auteur d'une société

Le 20 juin 2006, la Cour de cassation a rendu un arrêt attendu dans une affaire ayant fait l’objet d’une note antérieure éditée sur Vox PI.
Petit rappel… En 2004, la Cour d’appel de Paris avait estimé que la société CÉLINE et Mme S., agissant conjointement en contrefaçon de droits d’auteur et concurrence parasitaire à l’encontre de sociétés commercialisant à bas prix des ceintures reproduisant les caractéristiques de leurs modèles, n’étaient pas recevables à agir faute d’avoir pu prouver la titularité de leurs droits sur les modèles argués de contrefaçon. Selon la Cour, la présomption de titularité dont se prévalait la société CÉLINE, exploitant commercialement les modèles, ne pouvait être retenue dès lors qu’elle supposait l’absence d’intervention / de revendication de l’auteur (en effet, selon l’Art. L 113-5 du Code de la Propriété Intellectuelle, en l’absence de revendication de l’auteur, l’exploitation d’une oeuvre par une personne morale sous son nom, fait présumer, à l’égard des tiers, que cette personne morale est titulaire du droit d’auteur). Or, ce n’était pas le cas puisque Mme S. était présente à l’action et arguait d’une atteinte à son droit moral de créatrice des ceintures. La société CÉLINE ne pouvait pas non plus justifier de son action à agir sur le fondement d’une cession à son profit des droits d’auteur de Mme S., cette dernière n’étant capable ni de justifier ses propres droits en démontrant de manière précise avoir créé les modèles litigieux, ni ladite cession des droits à la société Céline. L’issue finale de l’action engagée par CÉLINE (également incapable de justifier précisément d’une cession de droits à son profit) semblait donc favorable aux contrefacteurs.

Mais la Cour de cassation a donné un nouvel éclairage de l’Art. L 113-5 du C.P.I. en indiquant « (…) qu’il n’était pas contesté que la société Céline exploitait les modèles sous son nom et que Mme S. ne faisait valoir aucune revendication contre elle, de sorte que cette société était présumée titulaire, à l’encontre des tiers poursuivis en contrefaçon, de droits indépendants de la réalité de la cession, comme de la présence de l’auteur aux débats ou du bien-fondé de sa revendication personnelle au titre du droit moral (…)« . Ainsi, cet arrêt précise et facilite les conditions dans lesquelles une personne morale peut arguer de la présomption de titularité du droit d’auteur sur « ses » créations (les créations exploitées sous son nom). Même en cas de revendication par l’auteur-personne physique de ses droits sur l’oeuvre, et même en l’absence de preuve de cession de ses droits au profit d’une personne morale, celle-ci exploitant l’oeuvre sous son nom bénéficie de la présomption de titularité des droits sous la seule réserve que l’auteur-personne physique ne fasse valoir aucune revendication contre elle.

Les deux « auteurs » (la personne physique, démontrant sa qualité d’auteur, et la personne morale, bénéficiant de la présomption) d’une oeuvre sont donc désormais plus facilement recevables à agir conjointement contre les contrefacteurs, sur le fondement de leurs droits d’auteur respectifs (atteinte au droit moral et atteinte aux droits patrimoniaux). La protection juridique des créations exploitées par les sociétés n’en est que mieux garantie.

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