Emile Gallé (1846-1904), né à Nancy et célèbre céramiste-verrier de l’Art Nouveau, est passé à la postérité essentiellement en raison de l’originalité et de la qualité de sa production verrière, inspirée par l’étude de la nature.
C’est cette renommée mondiale de l’enfant du pays que la première chambre civile de la Cour d’appel de Nancy a voulu protéger, à la demande de sa descendante, en sanctionnant par un arrêt du 4 novembre 2004 (inédit), une société A… qui importait et commercialisait (sous la marque Gallé et la signature imitée du maître) des reproductions grossières de ses créations artistiques, fabriquées en Roumanie.
Dans un premier temps, la Cour d’appel a confirmé la qualité d’oeuvres d’arts des pièces de verrerie réalisées par ou sous le contrôle d’Emile Gallé. Bien que celles-ci furent (brillamment) produites industriellement dès la fin du XIXème siècle et quelques années après sa mort, elles reflètent toutes la personnalité de l’auteur et une recherche esthétique originale. En conséquence, elles bénéficiaient bien de la protection par droits d’auteur. Néanmoins, la Cour rappela que les droits patrimoniaux de l’auteur étant tombés dans le domaine public le 1er janvier 1975 (70 ans après sa mort), l’exploitation de l’oeuvre d’Emile Gallé par des tiers n’était pas critiquable à cet égard. Par contre, elle rappela qu’il ne saurait pour autant être admis qu’une telle exploitation (non autorisée) puisse porter atteinte à l’intégrité de l’oeuvre (c’est-à-dire au droit moral imprescriptible de l’auteur). Or, la société A… avait délibéremment cherché à créer un risque de confusion dans l’esprit du public (non spécialiste) entre les copies (de qualité médiocre, revêtues d’une signature imitée du maître et revendues exclusivement à des antiquaire et brocanteurs, laissant ainsi le soin à ces derniers d’informer ou pas leurs clients sur l’origine véritable des oeuvres) et les pièces originales de Gallé. En conséquence, la Cour a estimé qu’il y avait actes de contrefaçon des droits d’auteur d’E. Gallé, et a prononcé l’interdiction sous astreinte de tout acte de commercialisation de reproductions de ses oeuvres qui seraient dépourvues de la mention « copie » ou « reproduction » apparente et intégrée dans la masse de l’objet.
|
|
Marque n°99 821 399 |
Marque n°99 823 952 |
Dans un second temps, la Cour a, au surplus, annulé les deux marques françaises « GALLE » Nos. 99821399 et 99823952, enregistrées au nom de la société A… En effet, la Cour de Nancy a retenu que ces dépôts de marques avaient porté atteinte à un droit de la personnalité du maître verrier (à savoir son nom patronymique notoire « Gallé » repris à l’identique), en violation de l’interdiction stipulée par l’article L 711-4 du Code de la Propriété Intellectuelle. En choisissant de déposer le nom patronymique « Gallé » à titre de marque, la société attaquée a, de mauvaise foi, causé un préjudice aux descendants du créateur en faisant croire qu’ils avaient autorisé l’usage du nom de l’artiste à des fins purement commerciales, d’une part, et tenté de tirer profit de sa notoriété mondiale, d’autre part. Bien mal acquis ne profite jamais !
Dossier complet relatif aux « Faux Gallé » sur le site www.idverre.net.
Photo : Emile Gallé, Vase en verre camée 1900 aux motifs de chrysanthèmes,
© Coll. Part.